Poser les limites entre écoute de soi et discipline

Je prône la bienveillance et l’écoute de soi auprès de mes soumis.es… mais depuis mes débuts, j’ai pu malheureusement constater que ces valeurs, prises au pied de la lettre et poussées à l’extrême par certain.es… peuvent mener à un laxisme très problématique…

Aujourd’hui j’aimerais donc te parler de cette question et te permettre, je l’espère, de pousser ta réflection pour éviter de tomber dans le piège de trop t’écouter… au détriment de ta relation D/s.

S’écouter, connaître ses envies, besoins et surtout ses limites, c’est important !

Mettre en place un rapport humains et bienveillant dans mes relations D/s, encourager une discussion ouverte avant, pendant, après et entre les séances… C’est quelque chose qui m’as tenu à coeur dès mes débuts dans le BDSM.

Bien loin de condamner les séances à une ambiance “bisounours”, comme certain.es le pensent, j’ai pu constater que ma façon d’aborder les choses permet la création d’un lien tout en profondeur et plein de confiance mutuelle… ce qui permet d’aller encore plus loin en séance (en plus le clivage assez brutal entre discussion bienveillante et fermeté/violence/humiliantion peut décontenancer et approfondir l’emprise et le sentiment de soumission).

Envies, besoins et limites ne sont jamais acquises ! Elles peuvent bien évidemment changer dans le temps et il est important pour ta sécurité et ton épanouissement que tu sois capable de t’écouter et de communiquer ces changements à ta.on Dom/partenaire de jeu. Développer et maintenir un rapport humain et bienveillant au sein de ta relation D/s peut t’encourager à le faire sans craindre des remontrances.

En d’autres termes : t’écouter, connaître tes envies, besoins et limites, savoir les communiquer, sont des qualités extrêmement importantes à développer et des responsabilités qui te reviennent, en tant que soumis.e. Un.e soumis.e n’est jamais complètement passif.ve, car ce sont aussi ses envies, besoins et limites (qu’iel DOIT communiquer) qui, instrumentalisés par la.e Dom, donnent le ton aux séances. Faire ce travail permet à ta.on Dom d’avoir toutes les cartes en main pour jouer avec toi et t’encourager à donner le meilleur / te dépasser… en allant loin juste ce qu’il faut : jamais trop, ni pas assez !

En revanche, on peut “trop” s’écouter et finir par devenir un.e soumis.e feignant.e, qui se complaît dans le stricte minimum et/ou un.e soumis.e fuyant.e, qui, consciemment ou non, qui cherche à récupérer le contrôle en décidant de ne faire que ce qui est confortable et lui fait envie… excluant donc en totalité ou en partie, les désirs ou même le plaisir de la ou du Dom.

Je ne fais évidemment pas mention ici des relations D/s où la.e soumis.e a ouvertement un côté brat’ assumé et où ce genre de comportement fait partie du jeu.

Donner le contrôle

Laisser la.e Dom tout contrôler est le fantasme de beaucoup de soumis.es… et pourtant très peu (et même celle.ux qui sont persuadé.es d’avoir un comportement exemplaire) sont capables de laisser ce contrôle dans les mains de quelqu’un d’autre.

Et c’est normal, quelque part, parce que ça s’apprends ! Lâcher du lest, accepter de ne pas contrôler la situation et d’abandonner les rênes… c’est dur ! Ça demande beaucoup de confiance envers son partenaire et beaucoup de maîtrise et de connaissance de soi-même, car il ne s’agit pas seulement de donner le contrôle… mais aussi d’accepter que ce soit l’autre qui l’ai, de parvenir à remarquer rapidement les signes qui montrent qu’on est en train d’essayer de le récupérer pour agir dessus et de nouveau laisser aller ET de ne pas confondre “flemme de prendre ses responsabilités et/ou de se concentrer sur ce qui se passe” et “donner le/du contrôle”…

Cet apprentissage est long et demande énormément de travail, seul.e, mais aussi à deux. Aucun.e bon.ne dom se s’attend à ce que tu saches parfaitement le faire et c’est normal que ça prenne du temps et qu’il y ai des ratés (ce qui ne te dispense pas de faire de ton mieux pour travailler dessus en autonomie histoire d’alléger la charge mentale de ta.on partenaire de jeu). En revanche, si après un long travail et une belle évolution tu replonges d’un coup… il y a clairement un problème et, il faut travailler dessus.

La difficulté et le challenge sont inhérents au BDSM

Un.e bon.ne dom connaît tes limites et ne les outrepassera pas.

En revanche, iel ne te laissera certainement pas stagner dans ta zone de confort ! La difficulté et le challenge sont inhérents au BDSM : faire confiance aux ordres donnés et faire l’effort de les honorer au mieux est ton rôle, en tant que soumis.e.

En particulier si ta.on Dom t’accompagne et te connaît depuis longtemps et si iel, comme moi, favorise l’échange ouvert et humain, te laissant l’espace nécessaire pour exprimer des difficultés passagères, l’état de ta motivation, des besoins spécifiques, des craintes ou besoins que tu aurais, etc… tu n’as aucune excuse pour contourner, désobéir ou ne pas suivre la totalité des ordres qui t’ont été donnés !

Si iel te donnes des instructions, même si elles te paraissent trop compliquées ou insurmontables, c’est qu’iel te penses et t’estime prêt.e à les réaliser et à relever le défis.

Il se peut en revanche qu’iel se trompe et ai vu trop grand… et dans ce cas, faire la sourde oreille, ignorer ses instructions ou désobéir n’est certainement pas le bon comportement à avoir !

Que faire si un ordre donné par ta.on Dom est trop dur pour toi ou se rapproche trop de tes limites ?

Si tu estimes que l’ordre donné est trop intense ou poussé pour toi, tu peux le communiquer, demander des aménagements ou quelque chose de légèrement moins dur, que tu estimeras plus adapté. Il y a une ENORME différence entre communiquer un doute ou une difficulté, demander des ajustements et prendre des initiatives sans consulter ta.on dom, nier ses instructions ou désobéir.

Un.e bon.ne Dom sauras écouter tes difficultés et adapter les plans en fonction de tes capacités du moment.

Les seules exceptions valables (car évidemment, il y en a) concernent tout ce qui te mettrai immédiatement en danger / risquerais de te blesser dans un laps de temps où ta.on dom ne pourrais pas agir / donner son accord pour interrompre l’ordre donné.

Une petite story-time en guise d’exemple pour finir…

Il y a quasiment 1 an, j’ai fait une séance avec mon soumis le plus ancien, Jimmy. Je le connaît depuis longtemps, je sais ce qu’il aime, ai en tête ses limites, ai pu constater dans les séances précédentes jusqu’où il est capable d’aller… bref, j’avais les choses parfaitement en main pour l’accompagner au mieux. Et il le savait.

Ce jour là, Jimmy m’as demander une momification au cellophane, doublée d’une contrainte avec des cordes, pour se sentir parfaitement pris au piège. C’est quelque chose que nous avions déjà fait par le passé et, tout s’était très bien passé.

Nous avons pris le temps d’en discuter : il faisait chaud et lourd et une momification totale, comme les fois précédentes, me paraissait trop dangereux. Il a insisté et j’ai accepté à la condition de ne pas momifier ses pieds, ni sa tête à partir des clavicules) pour aider le corps à réguler sa température.

Cette solution lui convenait, j’ai donc glissé un plug dans ses fesses et commencé à le momifier en posant régulièrement la question de la suportabilité du plug et de la température… qui, selon lui, allaient très bien.

J’ai pris soin de glisser un vibromasseur commandable à distance, au niveau de son sexe, entre deux couches de cellophanes, en lui ordonnant de ne pas jouir… puisqu’après 20 jours de chasteté stricte, j’avais envie de le mettre un peu au défi.

Je l’ai ensuite allongé sur le lit et attaché, de façon à ce que ses mouvements, même en roulant ou en se tortillant, soient limités (comme il l’apprécie).

Puis, après m’être assurée que tout était assez confortable pour lui une dernière fois, j’ai quitté la chambre pour m’installer dans la pièce voisine.

Ce genre d’exercice d’abandon, nous l’avions déjà fait plusieurs fois par le passé, car il apprécie énormément se sentir complètement contraint et abandonné dans ces positions humiliantes.

Il sait qu’il peut m’appeler (il n’a jamais de baillon dans ces moments là et je reste à portée de voix et attentive) mais il est convenu qu’il ne le fasse qu’en cas d’extrême nécessité et que si tout se déroule bien, je ne le libère qu’à mon bon vouloir.

Je me pose, travaille sur un article et joue sur mon portable avec le curseur de son vibromasseur commendable à distance, quand j’entends du bruit dans la chambre.

J’attends quelques instants pour voir si ça se calme, car je l’autorise à se replacer légèrement dans le cas où la position deviendrai trop inconfortable et, le cellophane, ça fait beaucoup de bruit… mais le bruit ne se calme pas.

J’y vais, demande si tout va bien… et constate que mon Jimmy, non seulement s’est détaché, mais a aussi dégagé ses jambes du cellophane qui les enveloppait… Et cerise sur le gâteau, il a joui à cause du vibromasseur et se plaint du fait que le plug que j’ai inséré dans ses fesses lui fait mal.


Il m’explique qu’il fait trop chaud et que la momification est trop inconfortable, que la sueur lui a permis de se glisser en dehors de son cocon et qu’il s’est détaché avant de libérer ses jambes, pour plus de confort.

Ce qui m’a fâchée dans cette histoire, ce n’est pas que Jimmy ait jouis. Ni qu’il ait finalement eu trop chaud pour rester momifié et bien sage.

C’est le fait qu’il n’ait pas daigné m’appeler pour m’expliquer la situation, avouer le fait qu’il avait mal estimé ses capacités, m’indiquer que le plug devenait inconfortable (ce qui l’a pourtant assez irrité pour ne pas pouvoir suivre mes ordres d’anal pendant plusieurs jours après cette mésaventure) ou me demander soit d’ajuster la momification (en la découpant partiellement, par exemple), Soit en le libérant.

Ce comportement, il n’a pas su le justifier (quelle surprise…). Sa punition fut de me voir attristée et d’être privé, jusqu’à nouvel ordre, de son rang de soumis. Je lui ai interdit de porter ses cages de chasteté, couches et vêtements de petits et je lui ai dit que, puisqu’il voulait tout décider seul… qu’il le fasse pour de vrai.

De l’eau est passée sous les ponts depuis, Jimmy n’est pas resté isolé très longtemps. Il a présenté ses excuses et s’est rattrapé en restant particulièrement sage, depuis cet incident.

Morale de l’histoire : Jimmy a fini par oublier que le fait que je lui laisse de l’espace pour être attentif à lui-même et communiquer ses besoins et limites, ne veut pas dire pour autant qu’il peut se permettre de se passer de mon aval et décider lui-même de la marche à suivre en cas d’inconfort.

Jimmy aurait pu et du demander.
Jimmy ne l’a pas fait.
Ne fais pas comme Jimmy : demande.

Ta.on Dom n’est pas un.e figurant.e dont tu peux suivre les ordres à ta guise, comme bon te semble et dont tu peux oublier, comme si ça ne signifiait rien, le rôle, dans vôtre relation.

Ta.on Dom n’est pas un sextoy ni un accessoire, que tu sors et respecte quand ça t’amuse et jettes et ignore quand ça t’ennuie.

Ta.on Dom mérites le respect et ce respect commence par le fait d’avoir confiance en ses décisions et en sa capacité à t’écouter et à réajuster les ordres donnés quand ceux-ci ne te conviennent vraiment pas.

Si tu n’es pas prêt.e à ça, ou au moins à travailler dans cette direction, alors tu n’es pas prêt.e à te soumettre.

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Pour un BDSM thérapeutique